Lorsque je chevauchais vers le nord, en direction des montagnes, aux alentours du lac Isabella, entre les lignes de code de Red Dead Redemption 2, oeuvre d’art majeure du 21e siècle, c’était dans un but bien précis : capturer et apprivoiser le Pur-sang Arabe à la robe blanche et aux sabots de vent, le seul disponible dans le jeu. Je le nommerais Putride, en hommage aux cadavres des loups auxquels j’avais eu affaire en chemin.
Le cheval du dernier défilé Céline s’appelle Frijole et il a neuf ans. On l’aperçoit par intermittence sur les images, éternellement en noir & blanc, du show intitulé Symphonie Fantastique, en hommage à la symphonie de Berlioz composée en 1830, pour mettre en musique l’amour non réciproque. Est-ce par provocation que Hedi Slimane en a emprunté le titre ? Le designer serait sur le départ, LVMH ne souhaitant pas répondre positivement à ses exigences toujours plus extravagantes et prolonger son contrat…
Une faucheuse lookée se tient devant un jukebox parachuté au milieu de nulle part. La parade nuptiale a d’étranges airs de cortège funèbre avec toutes ces Cadillac noires comme des corbillards. On se croirait dans le clip de Doing it to death des Kills. Fait et refait, c’est un peu le mantra d’un Slimane qui continue de broder sur son thème favori : la ligne « I », fine comme une épingle de cravate. Les redingotes, costumes à 3 boutons et gilets brodés à la main – exclusivement coupés dans les tissus les plus précieux et les plus luxueux tels que la soie, le cachemire et la vigogne – sont portés par des ersatz de Keith Richards périodes sixties, avec les petites lunettes biscornues et des bottines que Jules Koundé a déjà pré-commandées. Dans l’immensité du désert californien, taches d’huile dans le vide minéral, toute une procession d’ombres s’élève de l’asphalte ardent, chics comme des playboys à chapeau. Ultime création sublime, tirée au cordeau, à l’écart du monde. Trois petits tours et puis s’en vont. Déjà, la messe est dite. La musique est finie et le jukebox s’embrase… Tant de ces silhouettes, tombées dans l’abîme du temps, nous les pleurerions ensuite.