Un article de Bruce TRINGALE

Mine de rien, avec presque 10 années au compteur, les Hollywood Vampires, ce super groupe formé de Joe Perry et de Johnny Depp autour d’Alice Cooper en souvenir de ses beuveries avec Jim Morrison, Harry Nilsson et John Lennon, auront d’avantage vécu que l’Alice Cooper Band.
Oh, certes la comparaison s’arrête net puisque les Vampires sont loin d’avoir commis des œuvres maîtresses comme Killer ou School’s Out mais tout de même…Alice, tout comme son frère d’arme Iggy Pop, prouve que l’on peut faire péter du décibel à 75 ans tout en restant digne, classieux et rock !

Les boomers parmi vous se rappelleront des rires sardoniques qui accompagnèrent les reformations des Stones (la tournée Steel Wheels) et du Floyd post-Waters et du fait qu’on traitait alors de Papys du rock des quinquagénaires, pour comprendre qu’effectivement, les temps changent…
Et qui à cet âge peut se targuer d’avoir une actualité aussi chargée qu’Alice Cooper ? Un nouvel album à paraître en août, les remasters inespérés de Killer et School’s Out et la parution du live des Vampires à Rio en 2015…


Une étrange promotion donc d’un album enregistré il y a 8 ans mais foin de cynisme : depuis son retour sur le devant de la scène avec Brutal Planet au début des années 2000, Alice Cooper, à l’instar de l’un de ses grand admirateurs, Bob Dylan, s’est engagé dans un Never Ending Tour et le fait qu’il puisse connaître les joies simples de jouer en groupe sans tout le saint cirque de sa scène habituelle n’est probablement pas anodin.

Les Vampires investissent la scène après la 1ère partie de Last Temptation, un groupe français qui porte le nom du dernier grand album ambitieux de Cooper ! Oui ! Ça ne s’invente pas.
Les suceurs de sang attaquent directement à la jugulaire avec 2 compositions de très bonne facture : “I Want My Now” et “Raise The Dead”.  Alice chante juste, Joe Perry dégage une aura phénoménale et Johnny Depp, la cheville en attelle, occupe discrètement, humblement la partie gauche de la scène. Le son tout au long du concert sera assez brouillon, la guitare de Perry mixée souvent inutilement suraiguë.

1ère surprise : Alice entame alors son légendaire I’m Eighteen absent du répertoire des Vampires, tout du moins sur le disque Live.  Il la chante avec tant de conviction-et le public avec lui- qu’il pourrait en changer les paroles (“I’m 75 and I like it !”) sans se déshonorer. Un grand moment d’un concert qui va ensuite se disperser sans que l’on sache si c’est pour le meilleur ou pour le pire.

Car The Hollywood Vampires est un aussi un Tribute Band qui va enchainer les reprises plus ou moins inspirées à tel point que la set-list, à l’image des albums studios, se transforme, c’est selon,  en une déclaration d’amour au rock ou en joyeux foutoir.

The Doors, The Who, AC/DC sont ainsi convoqués dans des versions énergiques et toujours plaisantes à écouter dans leurs instrumentations mais moins convaincantes dans les parties vocales (car, oui Alice ne parvient pas à faire oublier Bon Scott ou Roger Daltrey).
Ce qui ne fonctionne pas en studio ne parvient pas d’avantage à convaincre sur scène : les voix fades de Joe Perry et de Johnny Depp sur « You Can’t Put Your Arms Around A Memory” de Johnny Thunders (que Duff McKagan intérimaire des Hollywood Vampires maîtrise depuis des années) et surtout le “Heroes” de Bowie permettent de se concentrer sur des détails scéniques pour passer le temps : les jolies projections des scènes de liesse de la chute du mur de Berlin et le fait qu’Alice  empoigne pour la première fois sur scène une guitare pour accompagner les rythmiques de ces chansons. Dommage, car dans leurs propres compositions, les Vampires sont capables de grandes choses comme ce “Who’s LaughingNow” aux parfums de Classiks et à la scénographie diabolique.
A peine lancée que la machine retombe dans le Tribute mais cette fois-ci l’affaire fonctionne.
C’est d’abord un hommage aux instrumentaux de Jeff Beck par Joe Perry avant qu’il n’exécute “Bright Light Fright” d’Aerosmith et “Walk This Way” où le public couvre la voix du groupe sur le refrain.

Le mix pourri ne permet pas de rendre justice au titre de Killing Joke “The Death and Resurrection Show”, too bad car cette incursion dans le rock industriel s’avérait intéressante.
Tout est pardonné avec le rappel et l’éternel “School’s Out” que Cooper s’amuse à mixer habilement depuis des années avec le “Another Brick In The Wall” du Floyd, histoire de rappeler que Bob Ezrin, fort de son expérience avec Alice, recycla pour Roger Waters ces enfants qui s’époumone contre les écoles.

Si l’école et le concert sont finis, il nous reste quelques jolis moments backstage : croiser tout sourire le batteur Glen Sobel qui n’a pas démérité, le bassiste Chris Wyse qui officie également pour The Cult ainsi que Tommy Henriksen qui produit et compose pour Alice depuis 12 ans et dernier membre officiel des Vampires. Tout au long du concert, il saura faire preuve d’une belle présence scénique tout en étant le plus jeune de la bande. Backstage, il déambule avec ses bouteilles pour se réhydrater.
Et puis, je croise Alice l’espace de 10 secondes dans les escaliers et j’obtiens mon graal personnel : une dédicace sur le 1er exemplaire de The Last Temptation signé par Neil Gaiman, Dave McKean et Alice. Pas de rencontre avec les fans, Cooper s’engonce immédiatement avec sa femme Sherryl dans son car. Je dois m’estimer heureux en comparaison qui attendent de l’entrevoir sur le parking du Zenith.

Les derniers trains des banlieues sont insensibles à mon bonheur et je presse le pas sans attendre que Joe Perry ou Johnny Depp ne sortent de leurs loges.It’s the lilltlethings that drives me wild…