On avait tous compris en visionnant la bande-annonce du Napoléon de Ridley Scott, sur fond de Black Sabbath, que toute cette entreprise n’était qu’une vaste (et chère) plaisanterie, destinée à un public (mais lequel ?) qui avait bien aimé l’étalonnage du DiCaprio en Revenant, délirant sur la banquise après s’être fait attaquer par un ours. Le mépris historique, avec ses drapeaux français anachroniques, ses pyramides bombardées, son exécution de Marie-Antoinette, etc., et l’incompréhension psychologique d’un personnage qui n’intéresse absolument pas le réalisateur qu’on se surprend à découvrir Britannique tant sa beauferie pue l’amerloque ne sont rien à côté de l’absence totale de profondeur artistique de l’entreprise. Enfin, on s’en fout, l’important est ailleurs !
Après quinze ans d’un processus de restauration vertigineux, qui aura coûté plus de quatre millions d’euros et presque autant de points de vision aux ingénieurs de La Cinémathèque, c’est le Napoléon (1927) d’Abel Gance (un véritable artiste, lui) qui s’apprête à montrer le bout de son tricorne lors d’une séance unique de ciné-concert. On parle d’un lieu qui permettrait d’accommoder les trois écrans nécessaires aux scènes de triptyques… Rendez-vous en juillet 2024 pour redécouvrir Artaud sublime en Marat et Albert Dieudonné dans le rôle-titre – qui en est devenu tellement ravagé qu’il a écrit un roman intitulé Le Tsar Napoléon afin de mieux récrire la fin de l’histoire –, pour revivre la bataille du Napoléon enfant dans la neige, ou la fuite en barque, avec le drapeau français en guise de voile… Il y a tout ça et plus encore dans ces presque sept heures de magie et d’invention constante.