Soixante ans qu’ils existent et trente qu’on se tape les mêmes excités de la plume à chaque nouvel album des Stones :  « Chansons anodines, gênantes, embarrassantes ; morceaux de variété commerciale ; pire titre de leur carrière ; voix de Jagger qui laisse à désirer ; compositions faiblardes ; McCartney en sauveur ; utilisation de l’IA et production FM clinquante et creuse… » Voilà un florilège de critiques de Hackney Diamonds, sans oublier les attaques plus personnelles et souvent gratuites, notamment contre Jagger (pour les plus jeunes ou les moins vieux, c’est le chanteur du groupe) et ses déhanchés. On est dans la lignée de ce qui se dit et s’écrit sur ce groupe depuis environ cinquante ans, depuis leur dernier album acceptable, selon les milieux autorisés. Je ne sais pas si les Stones utilisent le même filon depuis toutes ces années mais ils ne sont pas les seuls puisque les arguments négatifs, injustes et non fondés sont eux aussi répétés à l’infini, permettant à leurs auteurs de faire leur beurre sur le dos des rockeurs immortels.
Loin de nous l’idée de considérer que les Glimmer Twins n’ont fait que des morceaux géniaux. Ils ont eu des hauts et des bas comme la majorité des artistes. Nous nous sommes quand même permis de regarder la liste de leurs morceaux réussis, parus après 1972 (date de sortie de leur dernier « bon » album) : Dancing with Mr. D, Heartbreaker, Angie, Hide your love, Winter, It’s only rock n’ roll, Time waits for no one, Memory Motel, Melody, Fool to cry, Miss you, Beast of burden, Down in the hole, Emotional rescue, Start me up, Worried about you, No use in crying, Waiting on a friend, One hit (to the body), Rock and a hard place, Slipping away, Love is strong, You got me rocking, Thru and thru, Flip the switch, Anybody seen my baby?, Out of control, Saint of me, Streets of love, This place is empty, Laugh, I nearly died… Et même Doom & Gloom, sorti en 2012, qui tient la comparaison avec leurs meilleurs titres des années 60 et 70. Sur Hackney Diamonds, on trouve encore quelques pépites, en creusant un peu (Sweet sounds of heaven, Whole wide world ou Tell me straight).
Alors pourquoi tant de haine ?  Le succès colossal des Stones sur scène depuis des décennies, leur charisme, leur talent scénique, leurs compositions qui ont marqué l’histoire de la musique rock ne peuvent être, pour « ceux qui savent », que les preuves accablantes de leur médiocrité impardonnable, opium des « masses incultes », victimes de manipulations. Tenez bons, la carrière des Rolling Stones va bien finir par s’arrêter et vos insupportables propos venimeux aussi.

Les pierres qui roulent :
1. N’amassent pas mousse ;
2. Font un bruit éphémère d’une belle sauvagerie ;
3. Provoquent parfois en en entraînant d’autres dans leur chute des éboulements et des transformations de terrain.

Jean-Jacques Schuhl – Rose poussière